Mathilde Wittock, magicienne sur grand court
Mathilde Wittock
Une balle de tennis met 5 jours à être produite et elle est jetée au bout de 9 jeux.
A ce rythme, 5 000 balles sont utilisées par jour pendant le tournoi de Roland-Garros. Cela fait environ 100 000 balles par tournoi.
Bref, chaque année, plus de 17 millions de balles de tennis sont vendues en France… et chacune d’entre elles met 400 ans à se décomposer dans la nature. Gloups.
Pour recycler les balles de tennis, il faut séparer la feutrine du caoutchouc. C’est ce que fait la Fédération Française de Tennis depuis 2009, grâce à l’opération Balle Jaune. Mais cette opération ne permet de recycler qu’un million de balles de tennis (le caoutchouc est transformé en sols sportifs). Alors, que fait-on des 16 millions de balles restantes ?
Mathilde Wittock, designer belge, spécialisée dans l'innovation durable, a eu l’idée de faire du mobilier, des panneaux muraux et des cloisons acoustiques à partir de ces petites balles jaune fluo.
“Au cours de mes travaux, j’ai découvert que le caractère assez poreux des balles de tennis en faisait un très bon isolant. J’ai cherché un moyen de conserver leur forme… tout en les rendant à première vue méconnaissables.”
Elle a créé “Soundbounce”, un matériau qui fusionne le son, le design et l'écologie.
Quelles sont les étapes de création ?
1- Les balles de tennis sont coupées à la main le long de la bande blanche -ce qui permet de retirer le logo- et elles sont teintes avec des colorants écologiques.
2- Elles sont ensuite imbriquées dans des lattes de bois sans utiliser de colle.
Cette approche permet au matériau d’être totalement modulaire et recyclable : chaque mètre carré de Soundbounce compte environ 283 balles de tennis, ce qui représente 8,5 kg de CO2 recyclé.
Un banc = entre 300 et 500 balles.
Voici une petite vidéo qui montre la conception : chaque pièce prend 3 à 4 semaines à fabriquer.
Son innovation est non seulement écologique, elle est bonne pour vos oreilles. En effet, ce qui anime Mathilde, c’est d’explorer comment le design peut solliciter tous les sens — la vue, le toucher, l'ouïe et l'odorat. Elle est convaincue que l'impact d’un objet est renforcé lorsqu’il fait appel à nos sens.
“La plupart des designers créent pour l’œil, pas pour l’oreille.”
"Je suis très sensible au bruit. Pendant mes études de design, on m’a demandé de créer un produit pour un open spaces”, raconte-t-elle au journal belge L’Echo. “Alors j’ai étudié la question de la pollution sonore et son impact sur la santé. Les open space exigent des solutions qui réduisent au maximum le bruit. Les balles de tennis, recouvertes de feutre, absorbent bien le son.”
Son mobilier et ses panneaux acoustiques sont très demandés pour des espaces dédiés à la méditation, au bien-être, au coworking, et elle a déjà créé pour les salons VIP des tournois ATP à Londres, l'European et l'US Open. “Quelques joueurs m'en ont aussi commandé” confie-t-elle.
Grâce à la Fédération de Wallonie, elle dispose de 100 000 balles stockées — soit près de 9 mois de fabrication continue. Go Mathilde !